Dans un dernier article je vous parlais des quelques activités que j’avais effectuées autour de Quito dont l’excursion au Parc National du Cotopaxi. Culminant à 5897m, il est le deuxième volcan actif le plus haut du monde. En ce jour, nous avions marché jusqu’au refuge situé à 4800m puis encore jusqu’au début du glacier à 5000m. La petite marche était sympa, certes pas évidente à cette altitude mais j’avais rencontré aucun souci.
S’arrêter au début du glacier à 5000m alors qu’on peut faire l’ascension jusqu’au sommet était tout simplement impensable pour moi!! J’aime me lancer des challenges, essayer de dépasser mes limites, me surpasser, souffrir… un peu masochiste? Peut-être mais moi j’aime ça! 🙂 Alors comme j’étais déjà monté jusqu’à 5416m lors de mon trek au Népal et que je n’avais pas eu le moindre mal (hahaha ça fait warrior ça :)), je ne pouvais pas simplement me contenter de rêver de ce sommet, il fallait que je le fasse! Et gravir le deuxième volcan le plus haut du monde, ça en jette je trouve..!
…et (le plus dur) décharge l’agence de toutes responsabilités en cas d’accident.
Alors après mon séjour reposant dans la jungle de Cuyabeno, je me rapproche de quelques agences de trekking qui propose l’ascension et en trouve une qui m’a l’air très correcte. Si je dois marcher à une altitude proche de 6000m, sur un glacier techniquement pas très compliqué mais ayant tout de même de profondes crevasses et tout ça avec un temps changeant très rapidement, alors j’ai envie de le faire avec une agence sérieuse et un guide expérimenté. Après avoir eu toutes les informations nécessaires, je lis bien les conditions, les accepte, signe en bas de la page et (le plus dur) décharge l’agence de toutes responsabilités en cas d’accident.
Le matin du 12 juillet, je quitte mon auberge de jeunesse et me rends à 09h30 à l’agence où on doit recevoir tout l’équipement nécessaire. Je fais d’abord connaissance de mes coéquipiers qui tenteront également l’ascension. Avec moi : 2 Canadiens, 1 Australien, 1 Allemande, 1 de ? et 2 Genevois! On reçoit tout notre équipement dont des vêtements polaires et Gortex, des chaussures à coque dure, des crampons, un pic à glace, un casque et une lampe frontale.
La loi (appelons ça la loi), impose d’avoir au maximum 2 personnes avec un guide. En partant de cette obligation, deux choix s’offrent à moi. Soit je partage ce guide avec un binôme soit je me la joue perso et paye le double du prix en ayant mon propre guide. En étant deux par cordée, le risque étant que si l’autre personne se sent mal, se blesse ou ne peut plus avancer pour x raisons, je dois redescendre avec eux. Si j’ai mon propre guide, je ne pourrai en vouloir qu’à moi-même si je n’atteins pas le sommet. Bon comme le prix est déjà relativement élevé pour deux personnes, je prends tout de même ce risque, bien qu’il soit réduit dans mon cas vu qu’il y aura 4 cordées et qu’il sera possible qu’un des deux rejoigne une d’entres-elles pour redescendre. Car d’après ce que j’ai compris, descendre à plus de 2 personnes n’est plus un problème.. mouais…
Après avoir touché le matériel, on se met en route (je suis toujours à Quito) pour aller manger. De là, on se dirige dans le parc national du Cotopaxi où on enfile nos couches avant de monter jusqu’au refuge car le temps change très vite et mieux vaut pas être trempé avant d’avoir commencé. Depuis le parking (à 4500m), on monte jusqu’au refuge à 4800m avec toutes nos affaires, ce qui nous prend environ 40min.
On dépose notre matériel dans le dortoir puis on se met autour d’une table dans le réfectoire avec un thé de Coca (une des vertus des feuilles de Coca est d’aider en cas de mal de l’altitude) car il fait déjà très froid. On le boit, on le mâche… ça dépend des gens! Puis c’est l’heure de former les binômes pour l’ascension. C’est les guides qui décideront de qui ira avec qui, selon le physique et ce qu’ils ont vu durant la première montée. Mon binôme sera Robert, l’Australien! J’ai confiance en lui, on avait le même rythme en montant et il a l’air sportif!
On reçoit les dernières instructions, on soupe et on va se coucher à 20h, histoire d’avoir quelques heures de « sommeil ». Il m’est impossible de fermer l’oeil durant la nuit… le vent souffle à une vitesse infernale, ce qui produit un bruit continue très fort et de plus il fait -10°C… Se lever durant la nuit pour aller aux toilettes a également été un sacré challenge! Bon ben je passerai les quelques 3h qu’il me reste avant de me lever à jouer à Candy Crush (dans mon sac de couchage donc, pas sur les chiottes qui se trouvent dehors) puis somnoler!
Minuit, les réveils commencent à sonner : DEBOUT! On hésite longtemps à sortir du sac de couchage tellement il fait froid! Allez on enfile toutes nos couches et on va déjeuner histoire de prendre quelques forces et pas partir le ventre vide. Certains ont déjà un mal de crâne en raison d’une mauvaise acclimatation.. Mais qu’à cela ne tienne, une fois que tout le monde est prêt, habillé et équipé, à 01h30, on se met à marcher en direction du glacier. Là, on croche nos crampons, on s’encorde et c’est parti pour 6-7h d’ascension!
Le ciel est complètement dégagé, les étoiles et la lune brillent dans le ciel mais il fait un froid de canard! Plus on monte et plus le vent nous glace le visage. A une hauteur d’environ 5700m des grésillons commencent de tomber et avec le vent je peux dire que ça fait un sacré peeling! On doit s’arrêter plusieurs fois car ça devient très dur. Robert veut abandonner plus d’une fois mais il n’en est pas question! Je sais qu’il a la force… et quand on est vraiment à bout, c’est la tête qui prend le relais! Moi aussi je suis complètement crevé, j’ai les yeux qui se ferment tout seuls, mes jambes ont du mal à me porter et j’ai du mal de respirer… Mais j’me suis pas levé à minuit, j’ai pas déjà marché 5h pour tout abandonner à à peine 1h30 du sommet!! Alors je lui fou un coup de pied au cul et on continuera comme ça jusqu’au sommet! Les dernières 20 minutes sont très pénibles car il faut pratiquement planter le pic et se tirer avec les bras pour monter tellement la pente est raide…
…mais l’excitation de pouvoir me dire un jour : oui je suis allé sur le 2ème plus haut volcan du monde m’a permis d’y arriver!
6h30 plus tard, à 8h00, c’est sous un soleil de plomb et un froid glacial qui gèle mes larmes instantanément qu’on pose le pied au sommet de ce mastodonte!! J’ai du aller puiser des ressources au fond de moi dont je ne connaissais pas l’existence, chaque pas m’endormais un peu plus mais l’excitation de pouvoir me dire un jour : oui je suis allé sur le 2ème plus haut volcan du monde m’a permis d’y arriver!
Notre guide nous apprend que les 3 autres cordées de mes coéquipiers ont abandonné en cours d’ascension… Nous serons donc les seuls survivants! Au total, ce matin, on sera 4 cordées au sommet!
La vue à 5897m est à couper le souffle! On aperçoit la ville de Quito au loin et le Chimborazo (plus haut sommet d’Equateur) avec ses 6268m. Mais les -30°C ainsi que les émanations de fumées de souffre du volcan ne nous permettent d’y rester qu’une quinzaine de minutes, ce qui est assez frustrant je dois dire après tous ces efforts… Mais la forte odeur de souffre nous empêche carrément de respirer.
Alors on s’encorde à nouveau et on commence la descente. Après quelques minutes, je commence d’avoir un mal de crâne infernal, comme on perd de l’altitude je pensais qu’il disparaitrait mais au contraire, j’ai de plus en plus mal! Remède? Aucun… Alors on sert les dents et on pose un pied devant l’autre.
La descente dure 2h30 et bien que moins fatigante que la montée, elle se révèle être douloureuse pour les genoux!…
A environ 11h00 j’arrive enfin au refuge, complètement exténué mais heureux d’avoir réaliser cet exploit… on reçoit les félicitations des autres guides ainsi que de nos coéquipiers puis sans plus attendre, on fait nos sacs et on descend encore les 300m de dénivelé jusqu’au bus.
L’expérience a été éprouvante et douloureuse mais m’a montré que l’état physique n’était pas le seul élément qui permettait de se surpasser! La force mentale, la persévérance, l’envie et (surtout?) un peu de folie… tout ça permet d’aller bien plus loin que ce qu’on croit! Je sais que je n’ai pas gravi l’Everest, que de courir un Marathon ou encore travailler 12h par jour demande également beaucoup de courage et de force mais en ce qui me concerne, gravir un volcan à quasiment 6000m a probablement été la chose la plus dure que j’ai fait de toute ma vie.
J’ai également eu beaucoup de chance de pouvoir gravir ce sommet en toute sécurité car il y a quelques jours (le 15.08), le volcan est entré en éruption et a mis les alentours en alerte. Actuellement, la situation est stable, il n’y a eu que de la fumée (dont un panache de cendres qui est monté à 8km d’altitude) et aucune trace de lave détectée. Mais l’état d’exception a été décrété par le Président.
Pour en savoir un peu plus:
Voilà.
A bientôt!
Yannick
Capitaine Rémi
Juste énorme ! Il faut absolument que je me fasse un trip dans ce genre là !!! T’as l’air d’en avoir bien chié quand même.
bravo !!
Yannick Schaller
Merci cap’taine! Pour être sincère, oui j’en ai bavé! Mais si tu aimes aller chercher tes limites, je te le conseille vivement! Ou un autre bien entendu..! Je vais tenter un 6000 la prochaine fois 🙂