• jeudi, 10 octobre 2024
Mon expérience à bord du Transsibérien

Mon expérience à bord du Transsibérien

Tout d’abord, pourquoi avoir choisi de voyager en train à bord du Transsibérien?  J’avais envie de vivre le début de mon voyage en prenant mon temps, en étant dépaysé mais progressivement. Voyager à bord de ce train mythique est tout simplement une expérience en soit. Contempler les paysages, s’allonger sur son lit, lire, rencontrer des gens, manger quand on a envie… Tout ça je vais essayer de vous le raconter jour après jour.

Lundi 18.08.2014

Je quitte mon auberge à 22h avec mon paquetage complet, mon billet électronique du train en poche. Après 3 stations de métro, j’arrive à la gare Yaroslavsky, où j’embarquerai à bord du transsibérien pour un périple de 5185 km en 4 jours et demi . Première difficulté de la soirée : trouver les guichets pour changer mon billet électronique contre le vrai.

Je commence de regarder les panneaux, je me promène de gauche à droite (comme je ne savais pas vraiment comment m’y prendre, je me suis dit que je me pointerais assez en avance) pour tenter de trouver la bonne caisse. Etant chargé comme un mulet avec en plus des provisions pour 2-3 jours, c’est pas évident de marcher à travers le monde mais je finis par trouver des informations. Après 30 min, je me retrouve avec un papier où est écrit 00:00… La seule information que j’aurai pu retirer est, probablement, l’heure à laquelle il faut aller pour changer mes billets. C’est du moins ce que je supposerai car personne derrière les guichets ne parle un mot d’anglais… bonjour la galère…

Bref, je me dis que je laisse tomber pour l’instant et sans trop de souci, je vais étaler toutes mes affaires dans la salle de repos. Mon train partant à 00:35, et les bons billets n’étant toujours pas en ma possession (il est 23h30), après quelques instants je décide de retenter ma chance. Je me dirige vers une caisse et, dans un élan d’espoir inespéré, demande : do you speak english? La réponse fut simple : niet niet… ok tant pis, je lui donne quand même les billets électroniques et attends. On tente de communiquer, de se comprendre, c’est dur. Heureusement, une dame qui parle 3 mots d’anglais arrive derrière moi et m’aide (l’aide) comme elle peut.

billetsAu final, à 00:25, elle me donne mes 2 billets (Moscou-Irkutsk / Irkutsk-Ulan Ude). Je ramasse mes affaires en moins de 2 et je cours vers le quai où m’attend sagement mon train. Je fais contrôler mon billet à la provodnitsa (la personne qui sera pendant mon voyage : le contrôleur, l’agent d’entretien et mon hôtesse). J’arrive dans ma cabine dans laquelle il y a déjà deux autres personnes, des russes. J’ai choisi de voyager en classe kupe qui est la deuxième classe, un compartiment fermé à 4 couchettes.

À 00:35, le train se met en branle et Moscou disparaît petit à petit, jusqu’à disparaître complètement. La provodnitsa m’apporte mes draps, je fais mon lit et je m’endors, bercé par le train.

19.08 Transsibérien Jour 1

Je découvre au réveil des paysages totalement différents de ceux que j’ai laissé en allant me coucher. Des étendus de forêts défilent sous mes yeux. Je prends mon premier petit déjeuné puis je me laisse emporter par le temps qui passe. Un temps à bord du train qui se vie différemment pour chacun. Comme il n’y a pas de repère durant la journée, et surtout aucune obligation, les heures tournent un peu au ralenti. Un samovar (un chauffe-eau) est disponible dans chaque wagon. Il me permettra de préparer mes soupes en sachet achetées à Moscou et également boire du thé à longueur de journée. A 16h00 j’en profite donc pour gouter la première soupe, pas si mal! Comme j’ai des sachets de thé à profusion mais que j’ai oublié le sucre, je décide d’aller à sa recherche lors d’un arrêt de 15min à Kirov (Vyatka). J’en trouverai dans un des nombreux petits kiosques situés le long des quais. A 22h15, je soupe des légumes crus, du pain, une soupe et un thé, avant d’aller me coucher.

20.08 Transsibérien Jour 2

levé du soleil

A bord du Transsibérien, on ne parle pas d’heure locale mais d’heure de Moscou. Dans toutes les gares que le train traverse, les horloges affichent également l’heure de Moscou. Ceci pour des questions de simplicité des horaires car le transsibérien, dans son parcours le plus long (Moscou-Vladivostok) traverse en tout 7 fuseaux horaires!  Moi, j’en traverserai 5.

A 9h13, j’arrive à Iekaterinbourg, ville frontière entre Europe et Asie, à déjà 1400km de Moscou. L’arrêt de 1h me laisse le temps d’aller à la gare pour un peu recharger mon ordinateur car ça ne fonctionne pas dans le train. Je m’enfile dans un petit resto turc avec de la musique électro-orientale à ne plus s’entendre! Je commande un thé et m’installe à une table. Je sors mon ordinateur, plonge ma main dans mon sac pour en sortir mon chargeur et … **** le chargeur est dans le train… Je remballe tout mon commerce, je me redirige vers le train, emporte cette fois-ci ce dont j’ai besoin et retourne dans mon petit café. Il me reste 20min, c’est déjà ça!

Le temps qui passe devient de plus en plus étrange. Croyant qu’il est 18h, il s’avère être 14h. On vit toujours à l’heure de Moscou, mais on a déjà traversé 2 fuseaux horaires… c’est une sensation difficile à comprendre et encore plus à expliquer! A Tioumen, l’arrivée de Sergei apporte un peu de nouveauté. Sergei est un personnage dont tous les clichés que j’avais concernant les russes lui correspondent. D’après ce que je comprends (dans un anglorusse très hésitant) c’est qu’il travaille pour Siemens sur un bateau. Il serait donc marin (tchouc-tchouc) comme il aime nous dire, ça veut dire tout en bas de l’échelle. Il se rend à Khabarovsk, à l’est de la Russie pour y travailler.

Je parlais donc des clichés. Une bouteille de cognac pour débuter, suivi d’une de vodka . Ok c’est des 0.5dl… mais quand même! Il me dit en me montrant son verre : no problem, russian style! Ok on en reparle en fin de journée! Après, (comme je l’avais lu) les russes aiment déballer toute leur nourriture et la partager avec leurs voisins de cabine. En moins de 2, il ne restera plus 1cm carré de libre sur la table. Il me propose toutes sortes de choses, des gros cornichons, un truc gluant tout blanc qui s’avère être le gras du lard, un sachet dont j’ai aucune idée de ce qu’il y a à l’intérieur (j’en déduirai que c’est en fait des pives de pins). Cette dégustation des produits du terroir se fera accompagnée de musiques russes. Drôle au début, après sa deuxième bouteille, il deviendra un peu désagréable. Durant la soirée, tellement ivre, il tombera de sa couchette… Quand je disais qu’on en reparlerait en fin de journée 🙂

déjeuner

21.08 Transsibérien Jour 3

Aujourd’hui je l’ai eu mon levé de soleil! Comme c’était tôt, je suis allé me recoucher. Après un moment de sommeil, j’entends d’une très petite voix : yaaanniiick? yaaanniiick? C’était Sergei qui voulait me propose du café! Je me lève et je me dirige dans le couloir, le temps qu’il finisse de découper et déguster son poisson pas frais avec sa bière. Moi j’attends juste qu’il finisse sa petite cuisine pour que je puisse aller à mon tour manger mes 250g de Nesquik tant attendus!

Après cet épisode, j’arrive en gare de Novossibirsk. Un arrêt d’une heure me permet de me rendre dans la gare pour acheter quelques provisions et recharger mes appareils. En revenant dans ma cabine, je m’aperçois qu’un nouveau type a pris la place de l’ancien. Il a l’air correct et même un peu timide. Mais ça… c’était au début… Vers 14h, mon ami Sergei invite mon nouveau voisin Richard pour partager le repas. Et hop c’est reparti, cognac, vodka, bières, tout coule à flot! Moi je suis couché sur ma couchette en train de lire. Soudain j’entends Sergei : Yannick? vodka! Comme ça en milieu d’après-midi, ça me tente pas trop… Alors je refuse. Mais il insiste, alors je re-refuse, il sort de la cabine et revient avec un verre. Bon ok, je crois que j’aurai pas le choix… si c’est la tradition alors je veux bien. Richard dit : tchouc tchouc! Moi je dis : da da tchouc tchouc! On boit cul sec (parce que ça se fait comme ça) : Na zdarovié! Après ils me font comprendre que la tradition c’est 3 verres. Ok je vous suis encore pour les deux prochains mais après fini! Bref ils essaieront de m’en renfiler encore et encore mais j’en ai assez.. Après ce petit apéritif, on parlera de la guerre 14-18, de Gorbatchev, j’essaie de leur expliquer le rôle de la Suisse pendant la guerre 39-45, ils comprennent rien (ok je suis pas super calé en histoire non plus).

Richard (à gauche) et Sergei (à droite)

Richard (à gauche) et Sergei (à droite)

Après avoir refait le monde, ils insistent vraiment pour que je joue aux cartes avec eux du coup je me dis que ça peut être drôle! Ils distribuent, on commence de jouer à un jeu dont je ne comprends rien aux règles, tantôt je gagne, tantôt je perds, je sais pas ce qui se passe mais c’était amusant! Après je me sauve dans le wagon restaurant pour être un peu plus tranquille. Après quelques instants : surprise! Les voilà qui arrivent… Je me sens observé, ils comprennent que je les fuis. Ils commandent une nouvelle bouteille de vodka alors que je retourne en cabine. Je fais connaissance avec tous les enfants qui sont dans mon wagon. J’apprends qu’il y a deux familles ukrainiennes qui fuient la guerre et qui n’ont pu emporter que 4 valises avec elle alors que le reste restera en Ukraine.

sergei parterre

Après un moment, voilà Richard qui arrive. Sa femme (qui est dans une autre cabine) l’aide à le mettre au lit et il ne lui faudra pas plus de 2 secondes pour dormir. Elle range tout leur commerce sur la table pour me faire un peu de place et je finis par souper avant de me coucher. Sergei arrivera complètement bourré quelques instants après. Il se couche, tombe à terre. Je le remets au lit, il tombe à nouveau… ok tu tomberas pas plus bas. Il passera toute la nuit parterre! Ça, c’était une journée mouvementée 🙂 !

21.08.2014 Transsibérien Jour 4

Dernier jour de train avant l’arrivée à Irkutsk. Comme la notion du temps n’a plus aucune importante, je me lève quand je veux. Les paysages sont maintenant fait de verdure, de petits villages constitués de maisons en bois avec des volets colorés, de plaines, des sommets au loin. Je passerai la fin du voyage en compagnie des familles ukrainiennes en essayant de comprendre leur situation, de leur expliquer la vision que l’on a en Suisse de ce conflit. Ne parlant que peu anglais, j’essaie tant bien que mal de les comprendre!

16h20 (heure de Moscou), 21h20 (heure locale), j’arrive en gare d’Irkutsk. La ville est très différente de Moscou. Les routes sont mauvaises, les bus dans un sale état, mais les gens ont l’air au contraire plus ouverts. Comme écrit sur ma réservation, je dois monter dans le bus numéro 20 qui est sensé m’amener proche de mon auberge. Je sors à l’arrêt mentionné et surprise! J’ai aucune idée d’où je me trouve alors je demande à une passante de m’aider, ce qu’elle fait volontiers. 35 min de marche plus tard, j’arrive enfin à mon auberge. Eeenfiiiin….

Voilà, voyager à bord de ce train fut une réelle expérience. J’aurai eu quelques dérangements mais dans l’ensemble j’aurai fait de belles rencontres et je suis content de l’avoir fait!

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